((/images/BPA Senat. oct 2012.jpg)) » La Commission des Affaires sociales (CAS) du Sénat vient, ce 3 octobre, de repousser l’échéance de la loi interdisant le Bisphénol A dans les contenants alimentaires à 2015. Les associations de protection de l’environnement et de la santé environnementale appellent le gouvernement et les sénateurs à ne pas suivre cette décision absurde et à adopter la loi avec son échéance original[1].
Un amendement incohérent. Comment justifier de conserver l’échéance de 2013 pour l’interdiction des produits destinés aux moins de trois ans et de repousser l’échéance générale à 2015 pour les femmes enceintes et les fœtus ? Le Bisphénol A est un perturbateur endocrinien. A ce titre, les expositions in utero sont celles dont les conséquences sur la santé sont les plus redoutées[2]; il est essentiel de protéger la période prénatale, extrêmement vulnérable. Il faut donc agir d’urgence sur la contamination des parents – une année de perdue, c’est 830 000 enfants de plus qui seront exposés dans le ventre maternel. On s’explique mal, d’ailleurs, pourquoi le marché serait prêt à relever la 1ère échéance d’ici 3 mois et pas la seconde dans 15 mois. Les alternatives existent. Les industriels se seraient-ils croisés les bras depuis le vote de septembre 2011 ? Ce n’est évidemment pas le cas : les produits de remplacement existent et fleurissent dans les rayons des magasins ; les associations en ont recensés pour toutes les applications alimentaires du BPA. De grands groupes comme Heinz et Nestlé ont développé une offre sans BPA, plusieurs autres firmes américaines proposent aussi, depuis avril 1999 pour certaines, des conserves sans BPA[3]. L’Anses a publié une liste de matériaux qui font tous l’objet d’applications commerciales[4]. Sans nier la nécessité de les évaluer, agiter l’argument de la « sûreté non prouvée » de ces alternatives relève de la mauvaise foi : faudrait-il donc retirer en urgence du marché les autres plastiques traditionnels, les nouveaux polyesters ou même le verre ? Par ailleurs, nous disposons en France de deux unités de recherche qui ont relevé le défi de résines « epoxy » innovantes sans BPA pour la conserverie[5]. Toxicité : encore plus de preuves qu’en avaient les Députés en 2011. Depuis l’adoption de la loi en septembre 2011 par l’Assemblée Nationale, les preuves de la toxicité à faibles doses du BPA n’ont fait que croître[6]. 700 études scientifiques ont été publiées qui montrent des effets dans 95% des cas : le BPA induit des maladies métaboliques et cardio-vasculaires, des cancers hormono-dépendants, des troubles du comportement et de la reproduction. Il induit des altérations épigénétiques susceptibles de programmer toutes les pathologies citées chez la descendance du sujet exposé. Nous savons aussi que l’exposition humaine est généralisée et se fait essentiellement par la voie alimentaire. Nous savons enfin que l’ensemble des écosystèmes sont affectés et que l’interdiction dans les contenants alimentaires n’est qu’une étape urgente, nécessaire mais insuffisante. Reniements politiques ? Le projet de loi sur le BPA dans les contenants alimentaires a été co-signé dans la législature précédente par les députés Jean-Marc Ayrault et Marisol Touraine, aujourd’hui respectivement 1er Ministre et Ministre de la Santé. Lors de la Conférence environnementale, le Président de la République s’est engagé sur les enjeux des perturbateurs endocriniens et la feuille de route a retenu comme mesure immédiate l’adoption de cette loi BPA. L’amendement injustifiable de la CAS impliquera une 2nde lecture et donc un délai supplémentaire à l’entrée en vigueur de la loi. La France PS-Verts en recul sur la France de Sarkozy ? L’activité unanime des parlementaires et du gouvernement au cours de la mandature précédente, sous majorité UMP, a donné à la France un rôle de premier plan dans la lutte contre les perturbateurs endocriniens. Alors que ces enjeux viennent de recevoir une reconnaissance mondiale sous les auspices de l’ONU et que les institutions européennes sont l’objet d’âpres guerres d’influence sur le devenir réglementaire des PE[7], nous avons besoin, plus que jamais, de la détermination des élus et des pouvoirs publics français et de leur engagement sans réserve pour la santé publique. Nous appelons le gouvernement et les sénateurs de la majorité et de l’opposition à adopter le 9 octobre prochain la loi avec son échéance original, comme les députés l’ont souhaité toutes tendances confondues en octobre 2011. Les 830 000 enfants qui vont naître en 2014 ne doivent pas subir les conséquences du retard pris par le calendrier parlementaire. C’est le rôle de la loi BPA de les protéger sans délai. [1]. http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl11-027.html#timeline-6 [2]. Developmental origins of non-communicable disease: Implications for research and public health, Robert Barouki, Peter D Gluckman, Philippe Grandjean, Mark Hanson, and Jerrold J Heindel, Environmental Health 2012, http://www.ehjournal.net/content/11/1/42 [3]. http://reseau-environnement-sante.fr/wp-content/uploads/2011/09/Note-alternatives-BPA.pdf [4]. http://www.anses.fr/Documents/CHIM2009sa0331.pdf [5]. Voir http://www5.montpellier.inra.fr/spo/recherche/Les-Polyphenols-et-leurs-interactions/Structure-et-mecanismes-de-formation/Structure-et-reactivite-des-composes-phenoliques [6]. Lire la synthèse du RES http://reseau-environnement-sante.fr/wp-content/uploads/2012/10/synthèse-études-BPA-oct11-sept12.pdf [7]. http://reseau-environnement-sante.fr/2012/10/03/actions-en-cours/lettre-ouverte-des-ong-a-la-commission-europeenne-sur-le-mandat-attribue-a-lefsa-pour-definir-les-pe/ «