Primaire de l’Ecologie – Débat de Lille : « L’art d’avoir toujours raison » de Schopenhauer revu par Eva JOLY … à lire dans le Nouvel Obs

((/images/N Hulot Joly Nouvel Obs.jpg)) Eva JOLY et Nicolas HULOT lors du débat Un passage qui m’a interpellé : __L’ultime stratagème de Schopenhauer – le numéro 38 – affirme que « si l’on s’aperçoit que l’adversaire est supérieur et que l’on ne va pas gagner, il faut tenir des propos désobligeants, blessants et grossiers. Être désobligeant, cela consiste à quitter l’objet de la querelle (puisqu’on a perdu la partie) pour passer à l’adversaire, et à l’attaquer d’une manière ou d’une autre dans ce qu’il est ».__ A lire en entier dans le __[NOUVEL OBS|http://leplus.nouvelobs.com/contribution/26277;l-art-d-avoir-toujours-raison-de-schopenhauer-revu-par-eva-joly.html|fr]__ __ »L’art d’avoir toujours raison » de Schopenhauer revu par Eva Joly__  » Éva Joly a certainement une fibre littéraire en elle. Ce n’est pas tellement dans sa bibliographie que cela se ressent, mais plutôt dans ses attaques.%%% Sélectionné et édité par Hélène Decommer Les gens du nord ont dans le cœur le soleil qu’ils n’ont pas dehors. Sauf Éva Joly, qui n’a pas fait de cadeau à Nicolas Hulot, lors de leur débat mercredi dernier dans le cadre de la primaire d’Europe Écologie-les Verts. L’ancienne magistrate s’est en effet montrée très offensive, pour ne pas dire belliqueuse, pour ne pas dire enflammée comme une omelette (franco)norvégienne, tandis que l’ancien animateur se contentait lui d’être technique, pour ne pas dire techno, pour ne pas dire franchement ennuyeux. Bref, à bien regarder leurs échanges, on pouvait assez aisément imaginer quelle avait pu être la préparation de chacun. Hulot avait sans doute soigneusement surligné ses fiches sur la taxe carbone avec son Stabilo couleur vert pomme – bio, cela va sans dire, mais ça va mieux en le disant. Joly, quant à elle, n’avait certainement fait que relire « L’art d’avoir toujours raison », d’Arthur Schopenhauer. Et cela suffisait.

((/images/N Hulot Joly Nouvel Obs.jpg))Car dans ce petit et génial traité inspiré des « Réfutations sophistiques » d’Aristote, le philosophe allemand délivre trente-huit stratagèmes pour terrasser tout contradicteur, que l’on ait raison ou – mieux encore ! – tort. Voyons ensemble de quels stratagèmes Eva Joly semble s’être inspirée. Tout d’abord du « stratagème numéro 1 : exagérer », c’est-à-dire « étirer l’affirmation de l’adversaire au-delà de ses limites naturelles, l’interpréter de la façon la plus générale possible ». Quand Éva Joly dit à Nicolas Hulot : « La caricature que tu fais de mes idées ne donnera à personne l’envie de voter pour moi », elle exagère. Du moins, on espère pour elle. Mais de quelle caricature parle-t-elle ? Éva Joly s’explique : « Je suis une femme étonnée que Nicolas ait utilisé contre moi les armes de ceux qui veulent une écologie à genoux et aux ordres des lobbies ». En affirmant ceci, la candidate applique le stratagème numéro 32 de Schopenhauer, à savoir « faire une association dégradante ». Schopenhauer nous prévient en effet que « nous pouvons rapidement éliminer ou du moins rendre suspecte une affirmation de l’adversaire opposée à la nôtre en la rangeant dans une catégorie exécrable, pour peu qu’elle s’y rattache par similitude ou même très vaguement ». La technique est simple et efficace: soit tu es de mon côté, soit de celui des lobbies – « berk » ! Eva Joly poursuivit son offensive en lançant : « On m’a accusée de porter une écologie punitive, mais l’habit ne fait pas le moine : je suis une femme combative, pas sectaire; déterminée, pas bornée ». Application classique du stratagème numéro 6 de Schopenhauer : « affirmer péremptoirement » : « En s’appuyant sur une « vérité d’évidence », en postulant ce que l’on aurait à prouver, on peut conduire l’interlocuteur à reconnaître la validité de notre thèse. Je ne suis ni sectaire, ni bornée, puisque c’est moi qui vous le dis ! Puis, Éva lança le coup de grâce à son adversaire en déclarant: « Tu n’as pas compris les années de lutte que j’ai passées à combattre les intérêts privés des multinationales ». On se retrouve là face à une mise en pratique subtile du stratagème numéro 13, que Schopenhauer appelle le « contraste engageant » : « pour faire en sorte que l’adversaire accepte notre thèse, nous devons lui en présenter le contraire et lui laisser le choix, ayant pris soin de mettre en évidence l’aspect péjoratif de cette antithèse. L’adversaire, sous peine qu’on croit qu’il cultive l’art du paradoxe, ne pourra faire autrement que de se rallier à notre manière de penser ». Autrement dit, ou tu défends mon combat à moi, Éva, ou tu défends celui des intérêts privés – « re-berk » – des multinationales – « re-re-berk » ! Face à tous ces stratagèmes qui ne disaient pas leur nom, il n’en fallait pas plus que pour le pauvre Hulot s’énerve, ce qui ne fit que réjouir Éva Joly puisque le « stratagème numéro 8 : susciter la colère de l’adversaire » invite justement à « mettre l’adversaire en colère, car dans sa fureur, il est hors d’état de porter un jugement correct et de percevoir son intérêt ». L’ex-animateur se dit ainsi « obligé de sortir de sa réserve » et, rappelant les deux repas pris avec Eva Joly – qui a payé l’addition ? – avant sa candidature, il déclara : « Ni moi, ni mon équipe n’avons eu le moindre propos déplacés sur Eva », qui met « dans ma bouche des propos que je n’ai pas tenus ». Avant de lâcher : « L’écologie de combat, ce n’est pas l’écologie des coups bas ! » Ce faisant, Hulot se mit à faire du Schopenhauer à son tour, puisque le « stratagème numéro 2 : jouer sur les mots », invite à « utiliser l’homonymie pour réfuter l’adversaire de façon lumineuse ». Jeudi matin, Cécile Duflot, la secrétaire d’Europe Ecologie – les Verts, a dit « regretter les dérapages » survenus au cours de l’affrontement Hulot-Joly : « Je pense, déclara-t-elle sur Europe 1, que chacun doit faire les efforts individuels pour faire primer la dimension collective. Peut-être que, hier soir, on est allé au bout de l’exercice ». Au bout ? Peut-être pas. L’ultime stratagème de Schopenhauer – le numéro 38 – affirme que « si l’on s’aperçoit que l’adversaire est supérieur et que l’on ne va pas gagner, il faut tenir des propos désobligeants, blessants et grossiers. Être désobligeant, cela consiste à quitter l’objet de la querelle (puisqu’on a perdu la partie) pour passer à l’adversaire, et à l’attaquer d’une manière ou d’une autre dans ce qu’il est ». … «