((/images/arton838.jpg)) %%% ACEN ( Alliance Citoyenne pour les Enjeux des Nanotechnologies )%%% [http://nano.acen-cacen.org/AccueiL|http://nano.acen-cacen.org/AccueiL|fr] %%% » En France, la loi portant engagement national pour l’environnement, dite Grenelle 2, vient d’être promulguée le 12 juillet 2010. Les dispositions relatives aux substances à l’état nanoparticulaire sont stipulées à l’article 185 de la loi et viennent confirmer l’article 42 de la loi Grenelle 1, promulguée le 3 août 2009, qui exige notamment des industriels une déclaration obligatoire des nanomatériaux qu’ils fabriquent, importent ou mettent sur le marché. %%% __Cette loi, qui devrait entrer en vigueur dans un délai d’un an, en août 2011, constitue un progrès notable … à condition qu’elle soit appliquée sur le terrain. Or, en la matière, l’absence de définition par les autorités françaises des termes « substances à l’état nanoparticulaire » offre aux industriels la possibilité, dans certains cas, de se dérober au mécanisme de la déclaration.__ %%%
__Zoom sur les questions de régulation, définition, et agrégation des nanomatériaux… et les enjeux politiques à la clé__%%% Alors que la réponse de l’Etat sur les suites à donner au débat public national sur les nanotechnologies est attendue de façon imminente, l’ACEN vous propose pour cette Revue de l’Actu des nanos du 21 juillet, un zoom sur les questions de régulation, définition, et d’agrégation des nanomatériaux. Des questions apparemment techniques et sémantiques, mais dans les faits bien plus politiques qu’il n’y paraît ! De la nécessité d’une régulation encadrant la commercialisation des nanotechnologies et nanomatériaux Le « Sustainability Council » de Nouvelle Zélande dénonce le retard de la régulation sur la commercialisation des nanotechnologies Même aux Etats-Unis, l’idée de la nécessité d’une régulation des nanos fait son chemin De récentes avancées en Europe et en France Quand la régulation se heurte aux problèmes de définition A côté des efforts de régulation, un exemple d’application du principe de prudence et de responsabilité De la nécessité d’une régulation encadrant la commercialisation des nanotechnologies et nanomatériaux%%% __Le « Sustainability Council » de Nouvelle Zélande dénonce le retard de la régulation sur la commercialisation des nanotechnologies__%%% Le 19 juin dernier, le « Sustainability Council » de Nouvelle Zélande rendait public son rapport sur la régulation des nanotechnologies, intitulé « The Invisible Revolution ». Rappelant qu’il y a quatre ans, le Ministre de la Recherche, des Sciences et des Technologies avait affirmé l’importance d’une bonne gouvernance des nanotechnologies – aussi essentielle que leur commercialisation – le Sustainability Council constate qu’une seule régulation a, depuis, été adoptée par la Nouvelle Zélande ; du fait des risques potentiels pour la santé et l’environnement, elle spécifie que les nanomatériaux utilisés ou importés pour être intégrés dans les cosmétiques doivent être signalés à l’Autorité de Management des Risques Environnementaux. Le Sustainability Council déplore qu’aucun signalement n’ait été effectué, malgré la présence de nombreux produits cosmétiques contenant des nanomatériaux sur le marché néozélandais. Un problème dû notamment à une définition trop stricte du terme de « nanoparticule » ? Nous revenons sur ce point plus bas.%%% A ce propos, un tout récent rapport de Thomson Reuters, « Can Nanotech Unlock the Fountain of Youth ? » (traduire Les nanotechnologies : fontaine de jouvence ?), rendu public ce 13 juillet, vient d’ailleurs de confirmer que le secteur de la beauté utilise de plus en plus massivement de nanomatériaux dans les crèmes, écrans solaires, shampoings et autres produits de soin personnel.%%% Même aux Etats-Unis, l’idée de la nécessité d’une régulation des nanos fait son chemin.%%% Même aux Etats-Unis – pays libéral où le concept de régulation, considérée par beaucoup comme une entrave à la liberté d’entreprendre, est plus impopulaire qu’en Europe – l’idée de la nécessité d’une régulation des nanos fait son chemin.%%% Fin juin 2010, des chercheurs du Programme de Santé génésique et Environnement de l’Université de Californie – San Francisco ont réclamé une régulation des nanomatériaux et nanoproduits dans un rapport demandé par l’Agence de Protection de l’Environnement de l’Etat de Californie.%%% Cette demande intervient trois semaines après la publication du rapport du Government Accountability Office (GAO) – la Cour des Comptes américaine – qui déplorait les lacunes des réglementations actuelles des nanotechnologies, et émettait une série de recommandations à destination de l’Agence de Protection Américaine fédérale cette fois-ci.%%% Fait plus rare, la même demande a également été exprimée par un représentant de l’industrie chimique : le PDG du département des Produits Chimiques et des Technologies de l’American Chemistry Council (ACC) et président de la Commission Nanotechnologies de l’ACC, Bill Gulledge, vient d’affirmer son souhait de voir développée une approche commune de la régulation des nanomatériaux au niveau fédéral américain (plutôt qu’une régulation propre à chaque Etat), ainsi qu’une coopération internationale en matière de sécurité nano. Il s’est dit favorable à l’adoption d’approches cohérentes en terme de régulation des nanomatériaux entre les Etats-Unis, l’Europe, le Canada et le reste du monde1.%%% Enfin, un rapport de la Mission pour la Science et la Technologie de l’Ambassade de France aux Etats-Unis, sur « La problématique Environnement, Santé et Sécurité dans le domaine des nanotechnologies aux Etats-Unis », sorti également en juin 2010, insiste aussi sur le fait que tant les pouvoirs publics que les entreprises, chercheurs, industriels et régulateurs s’accordent aujourd’hui à juger que la mise en place d’une régulation efficace et claire est une des clés pour un développement efficace des nanotechnologies. Il souligne également l’attention croissante portée par les agences américaines à la législation européenne.%%% __De récentes avancées en Europe et en France__%%% La législation des nanotechnologies en Europe et en France est en effet en avance par rapport au reste du monde. Ainsi que nous nous en faisions l’écho la semaine dernière, le Parlement européen a voté le 7 juillet dernier le réglement « Novel Foods » : s’il est approuvé par le Conseil, il permettra de de mieux contrôler les denrées alimentaires contenant des nanomatériaux fabriqués, ou consistant en nanomatériaux fabriqués, de limiter l’emploi des nanomatériaux dans les emballages alimentaires et d’informer les consommateurs sur la présence de nanomatériaux dans les denrées alimentaires.%%% En France, la loi portant engagement national pour l’environnement, dite Grenelle 2, vient d’être promulguée le 12 juillet 2010. Les dispositions relatives aux substances à l’état nanoparticulaire sont stipulées à l’article 185 de la loi et viennent confirmer l’article 42 de la loi Grenelle 1, promulguée le 3 août 2009, qui exige notamment des industriels une déclaration obligatoire des nanomatériaux qu’ils fabriquent, importent ou mettent sur le marché. Cette loi, qui devrait entrer en vigueur dans un délai en août 2011, constitue un progrès notable… à condition qu’elle soit appliquée sur le terrain. Or, en la matière, l’absence de définition par les autorités françaises des termes « substances à l’état nanoparticulaire » offre aux industriels la possibilité, dans certains cas, de se dérober au mécanisme de la déclaration.%%% (Rappelons également que le Grenelle ne prévoit pas un étiquetage à l’image de ce que prévoit Novel Foods. Donc, une fois mises sur le marché et intégrées dans des produits ou matériaux, ces nanos « disparaissent »…)%%% __Quand la régulation se heurte aux problèmes de définition__%%% Outre les nombreux problèmes techniques et scientifiques de caractérisation, détection et mesure des nanomatériaux sur lesquels nous aurons l’occasion de revenir, la mise au point et l’application de réglementations concernant les nanotechnologies et nanomatériaux se heurtent à un problème de taille : celui de la définition des termes employés – les questions à première vue sémantiques et très techniques recèlent en fait des dimensions tout à fait stratégiques et politiques. En effet, les termes comme « nanotechnologies », « nanoparticules » ou « nanomatériaux » sont des mots fourre-tout, utilisés par les uns et les autres sans que chacun y mette nécessairement le même sens. Or, en matière de régulation, chaque mot doit être précisément défini.%%% Par exemple, ainsi que le souligne Eric Gaffet, directeur de recherche au CNRS, dans le n° 71 de Santé & Travail paru ce mois, « pour appliquer les dispositions de la loi Grenelle 2 sur les substances à l’état de nanoparticules, il faut définir ce qu’est une nanoparticule (…). Si la définition est trop restrictive, se contentant par exemple d’une taille de 1 à 100 nanomètres, il ne serait pas surprenant qu’un certain nombre de produits industriels aient une taille de 101 nanomètres et échappent à la réglementation » 2.%%% C’est d’ailleurs sans doute l’une des explications à l’absence de déclaration opérée par les industriels néo-zélandais mentionnée plus haut : en Nouvelle Zélande, la réglementation oblige les industriels à seulement déclarer la présence de « nanoparticules » ayant notamment un diamètre inférieur à 100 nm. Or les nanoparticules sont souvent présentes dans les produits cosmétiques sous la forme d’agglomérats et d’agrégats dont le diamètre est presque toujours supérieur à 100 nm… Les autorités publiques européennes et américaine ont conscience de ce problème et donnent des signes encourageants. Ainsi, la « Food & Drug Administration » américaine a publié le mois dernier un guide sur les nanos dans les médicaments qui définit un nanomatériau comme un matériau dont l’une des dimensions au moins est inférieure à 1000 nm. En Europe, le Parlement et la Commission européenne ont chacun demandé des éclairages scientifiques sur la définition à donner aux termes « nanomatériau ».%%% La réponse à la demande du Parlement a été publiée juste avant le rapport de la FDA dans le rapport intitulé « Considérations sur une définition des nanomatériaux à des fins de régulation » du Centre Commun de Recherche (Joint Research Center) de la Commission européenne.%%% La réponse à la demande de la Commission vient de paraître la semaine dernière, via le rapport intitulé Scientific Basis for the Definition of the Term “Nanomaterial” du Comité scientifique des risques sanitaires émergents et nouveaux (SCENIHR). Ces trois documents promeuvent une définition large du terme « nanomatériau », avec un seuil plafond pouvant excéder les 100 nanomètres, et les deux documents européens préconisent la prise en compte des agrégats et agglomérats de nanoparticules par les législations. %%% Ces points, derrière une apparence technique, recèlent en fait des enjeux importants : dans le cadre des discussions actuelles menées sur le sujet par l’International Organisation for Standardisation (ISO) par exemple, l’industrie chimique allemande notamment refuse que les agrégats ou agglomérats de substances de taille nanométrique soient inclus dans la terminologie nano pour que ses produits ne soient pas soumis à d’éventuelles réglementations nano. A noter : le texte du SCENIHR est ouvert aux commentaires de tous jusqu’au 15 septembre ici. Un délai un peu court pour laisser aux acteurs concernés le temps de réagir, vu le calendrier et les congés d’été…%%% Selon Eric Juet, ingénieur de recherche au CNRS, membre du laboratoire de recherche I.O.D.E. de Rennes et impliqué dans le projet ANR de recherche NanoNorma, l’adoption une définition qui ne considère que la taille des matériaux est une solution de facilité peu satisfaisante, qui présenterait pour inconvénient de ne pas distinguer les matériaux présentant ou non des risques pour la santé humaine ou l’environnement. De fait, les risques varient d’un type de nanomatériau à l’autre et en fonction de nombreux autres paramètres, et quelle définition générale pourrait rendre compte de cette diversité tout en étant opérationnelle ? %%% Du fait des incertitudes scientifiques, de la complexité des dispositifs qu’il serait nécessaire de mettre en place, des désaccords entre experts et des résistances de certains industriels, on peut s’attendre à ce que les avancées en terme d’encadrement des nanotechnologies soient très lentes – trop pour envisager une protection suffisamment rapide des populations et de l’environnement ? Pour autant, on ne peut se résoudre à l’inaction. Les pouvoirs publics ont un rôle à jouer pour prévenir les situations à risques (ils financent des études de toxicité et d’écotoxicité, même si de façon insuffisante selon certains) et favoriser les orientations souhaitables ; espérons d’ailleurs que le débat public qui s’est déroulé cette année sera décliné à l’avenir afin d’associer la population et les acteurs concernés à la définition de ces orientations. %%% __A côté des efforts de régulation, un exemple d’application du principe de prudence et de responsabilité__%%% De leur côté, les centres de nanotechnologies et certains industriels ont compris qu’ils ont un intérêt à minimiser les risques pour la santé et l’environnement des nanomatériaux, notamment en développant les tests de toxicité et les mesures de précaution, et surtout en limitant et contrôlant des émissions. %%% Dans ce domaine, une initiative exemplaire est digne d’être mentionnée : le « Sustainability Council » de Nouvelle Zélande, dans son récent rapport cité plus haut, révélait en effet que l’entreprise néo-zélandaise Fisher and Paykel a choisi de ne pas utiliser de nanoparticules d’argent dans ses machines à laver, contrairement à son concurrent Samsung. Selon des études menées par la première marque, laver des vêtements à 20°C avec de la lessive permet d’éliminer 99,79% des bactéries, contre 99,9% pour la machine à laver SilverCare de Samsung (confirmant les conclusions d’une étude menée en 2005 par le Bureau de protection des consommateurs de Corée). Fisher and Paykel a donc jugé le gain dérisoire eu égard aux potentiels problèmes que peut poser le nano-argent sur l’environnement. C’est l’une des premières entreprises, à notre connaissance, à prendre publiquement position contre l’utilisation du nanoargent, rejoignant ainsi les alertes lancées par de nombreux acteurs associatifs, académiques, ou para-publics aussi parmi lesquels figurent notamment l’International Center for Technology Assessment (ICTA) en 2008, les Amis de la Terre en 2009, en France, le Haut Conseil de la santé publique et l’ AFSSET en 2010, ainsi que l’Institut fédéral d’évaluation des risques en Allemagne. %%% Vigilance et prudence sont de mise et justifient la restriction voire l’interdiction de l’utilisation de nanoargent dans les produits de consommation courante, jugé peu essentielle et potentiellement risquée, par opposition aux usages plus utiles, notamment dans le domaine médical – pour le traitement des brûlures ou des infections de la peau chez les diabétiques – où la comparaison des risques et des bénéfices est jugée moins défavorable. «