En définitive, ces élections régionales ont ouvert (enfin !) un débat non pas sur les enjeux régionaux, mais sur la capacité du politique et le sens du projet politique. __- La capacité du politique__ Le taux d’abstention fait partie du déni de réalité du politique qui cherche à l’expliquer par l’enjeu régional qui n’intéresserait pas les citoyens, par l’absence (prétendue) d’enjeu national, par la proximité des projets. __Le mal est beaucoup plus profond. Nos concitoyens ne sont pas allés voter car ils ne croient plus que le politique puisse régler les problèmes et en l’état, ils ont partiellement raison.__ Le retour sur la gestion de la crise économique et financière, la pérennité insolente du système financier et l’accroissement de la financiarisation de l’économie avec les revenus indécents qu’ils génèrent écœurent nos concitoyens confrontés à des licenciements qui se multiplient et à des fins de mois de plus en plus improbables. De même, le poids des lobbys dans notre système politique (voire la gestion de la grippe H 1N1) et les transgressions de la règle de droit au plus haut niveau ont fait perdre confiance dans la réalité d’un pouvoir politique au service de l’intérêt générale et du plus grand nombre. Dès lors, l’impératif démocratique consiste avant tout non pas à convaincre nos concitoyens de croire ce qui n’est pas, mais changer les comportements et mœurs politiques, préalable indispensable à toute reconquête de la confiance légitime que les citoyens devraient avoir dans leurs dirigeants. __- Le sens du projet politique__ La victoire de la gauche, mais surtout du PS, est facile à comprendre compte tenu du bon bilan en général des présidents de région et du rejet massif du sarkozysme. Pour autant, c’est un peu une victoire par défaut puisque le débat sur le projet politique qui permettra de transcender la crise et de vivre au mieux l’époque de transition entre deux mondes dans laquelle nous sommes entrés n’a pas été ouvert par eux et qu’il faudra bien le commencer. __C’est en cela que la construction de l’alternative, et non pas de l’alternance, s’impose.__
Il ne s’agit pas de se définir par rapport à la droite ou à la gauche. Dans leur version actuelle, l’une et l’autre sont les deux faces d’une même médaille estampillée vingtième siècle. __Certes, la question de la justice sociale est criante dans un monde où l’accroissement des inégalités est devenu un soi-disant principe d’amélioration de la compétitivité, donc de croissance.__ Dès lors la réponse néo-conservatrice dans laquelle nous baignons n’en est pas une. Mais, pour autant, la réponse socialiste n’innove en rien et retrouve la réponse UMP sur les grands choix d’infrastructures ( comme l’aéroport ND des Landes ), les grands choix énergétiques ( la prime à la centralisation énergétique et au nucléaire), le choix du modèle de développement. __Nous avons à inventer un nouveau modèle, pragmatique, progressif et cohérent, qui permette des choix publics bien évalués et une nouvelle industrialisation autour de l’économie verte, ce qui implique de ne regarder le nucléaire, à l’instar des allemands , au mieux pour elle que comme une énergie de transition.__ Ce modèle, fondé sur des nouveaux indicateurs, nécessite de répondre aux besoins fondamentaux de nos concitoyens en matière d’école, de santé, de justice, de services de proximité. Le dernier rapport du président Seguin démontre le très faible gain en terme de dépenses publiques de la réduction massive du nombre de fonctionnaires alors que les conséquences en terme de service rendu sont dramatiques. Un développement soutenable implique que toutes les données soient prises en compte pour permettre une approche globale et dans la durée. C’est une nouvelle économie qu’il convient de construire qui assure l’emploi en Europe comme en France dans les années qui viennent. __Or, cette transformation n’est possible que pour autant que le système financier soit très profondément changé et que l’Europe se renforce. Or, malheureusement, nous partons doublement dans la direction contraire.__ Elle n’est possible que pour autant que la totalité de nos moyens se focalisent sur les PME alors que l’Etat français ne jure que par les multinationales, dès lors qu’elles sont d’origine française, même si elles payent peu ou pas d’impôt, même si elles délocalisent et même si elles font payer par les usagers et/ou contribuables français leur développement extérieur… Cette révolution douce ne peut se faire que pour autant que la question démocratique soit clairement posée. Il ne s’agit plus seulement de « démocratie participative » mais de « démocratie participante », c’est-à-dire active. Elle implique , avant tout, de revenir sur toutes les mesures liberticides auxquelles nous assistons depuis deux ans, mais aussi de passer à une sixième République qui reconnaisse les contre-pouvoirs d’autant plus indispensables que la rigueur des temps impose, la participation la plus large possible. Elle ne peut se faire que pour autant que nous revenions aux bases de notre pacte du vivre ensemble, c’est-à-dire de notre pacte républicain liberté-égalité- fraternité auquel il faut ajouter laïcité. Le débat sur l’identité nationale n’a servi qu’à regonfler les thèses du FN au lieu de travailler de manière constructive. __Elle ne peut se faire que pour autant que nous soyons en mesure d’offrir aux générations futures, à commencer par nos propres enfants, des perspectives d’avenir c’est-à-dire une vrai projet pour eux et pour la planète.__ __Elle ne peut se faire que pour autant que nous prenions vraiment conscience du caractère global et interdépendant des crises, des problèmes régionaux (au sens de régions du monde) et des solutions.__ L’alternative est à construire autour de ces problématiques, ici et maintenant. Il n’est que temps de s’y mettre.