((/images/corinne_right.jpg))%%% Voici une analyse très pertinente et très lucide de la mondialisation et de ses conséquences dramatiques réalisée par Corinne Lepage, Présidente de CAP21 et Vice-Présidente du MoDem: enrichissement global important et explosion des inégalités et de la misère dans tous les pays.%%% Voici la Tribune France-Culture du 25 août 2008%%% __Corinne Lepage: Mondialisation phase 2__%%% La mondialisation telle que nous l’avons connue s’est donné pour objectif l’enrichissement du monde et pour moyen la libéralisation croissante des échanges, avec pour corollaire un effacement progressif du rôle des Etats. Ces deux fondements de la mondialisation sont aujourd’hui violemment remis en cause.%%%
D’une part, s’il y a eu enrichissement financier dans le monde et si un certain nombre de personnes dans les pays riches comme dans les pays émergents ont très largement profité de cette croissance, cet enrichissement s’est fait au prix d’un déséquilibre aujourd’hui inacceptable.%%% – déséquilibre tout d’abord entre les riches et pauvres qu’il s’agisse des pays ou des hommes, la croissance chinoise montrant par exemple qu’elle a largement bénéficié à 300 ou 400 millions de personnes mais en revanche qu’elle a aggravé la situation de plusieurs centaines de millions d’autres, qui n’ont pas vu leurs revenus augmenter, qui sont aujourd’hui privés d’un système de santé mais sont en revanche confrontés à des drames environnementaux et sanitaires sans précédent. Déséquilibre au sein des pays riches, où les pressions sur les salaires et les revenus de la classe moyenne sont à la baisse, pour légitimer une meilleure rentabilité des entreprises, cependant que les revenus des traders et managers des grandes entreprises représentent trois à 400 fois le salaire moyen.%%% – déséquilibre entre l’économie réelle et l’économie financière. La création de liquidités dans le monde a été beaucoup plus rapide que la croissance du P.I.B. L’ excès de croissance de la base monétaire mondiale serait de l’ordre de 2200 milliards de dollars de 1994 à 2005 soit un supplément de crédit de l’ordre de 9 300 milliards compte tenu de l’effet multiplicateur. La création de liquidités en excès a été alimentée, d’une part, par les banques centrales des pays émergents, et d’autre part, par le financement des achats d’actifs financiers et immobiliers en hausse. D’où des exigences de rentabilité absurdes imposées pour obtenir des retours sur fonds propres supérieurs à 20 % contre 15 % il y a dix ans, ce qui a conduit évidemment les banques à prendre des risques que toute l’économie supporte aujourd’hui.%%% – déséquilibre enfin entre la « croissance » et les ressources planétaires qui mettent aujourd’hui en péril la l’humanité elle-même : effets du changement climatique, insuffisance des matières premières au regard des besoins, déséquilibres dramatiques auxquelles conduit l’addiction au pétrole,crise alimentaire dont une des causes se trouve dans la promotion des biocarburants et une autre dans les orientations absurdes imposées par les organismes internationaux faveur du monoculture destinée à l’exportation et au détriment de toutes les cultures vivrières permettant la subsistance locale et enfin organisation massive de la sixième extinction des espèces du fait des destructions de la biodiversité.%%% Tout ceci a été rendu possible par un effacement progressif du rôle des Etats, une libéralisation mal contrôlée c’est-à-dire avec des règles du jeu incapables de maintenir un système permettant la préservation du développement sur le moyen et long terme d’ une part, une amélioration de la situation individuelle du plus grand nombre d’autre part. La crise écologique et la crise alimentaire sont les signes de cet échec.%%% Car ces deux modèles sont remis en cause. D’une part, la seule justification à la mondialisation est précisément l’enrichissement global et l’utopie d’une amélioration des déséquilibres de richesses. La récession se profile dans de nombreux pays et nul ne sait ce que sera la croissance chinoise post-JO. La crise alimentaire et la découverte que la croissance des pays émergents ne signifie pas nécessairement l’amélioration de la vie pour le plus grand nombre, a fortiori une progression de la démocratie ( les croissances les plus fortes se font souvent dans les pays les moins démocratiques ) remet en cause une mondialisation qui de plus mène sur le plan écologique le monde à sa perte.%%% D’autre part, on assiste à une remontée spectaculaire du rôle des Etats et du politique. Intervention massive de l’Etat américain pour sauver le système financier, obligation mise à la charge des banques d’indemniser les épargnants lésés par les achats d’obligations prétendument sûres, aide aux emprunteurs immobiliers. Virage politique dans le développement des fonds souverains qui dans un premier temps ont permis à la Chine, à l’Arabie saoudite ou à la Russie d’acquérir des participations massives dans le système bancaire et les grandes entreprises occidentales, puis qui conduisent dans un deuxième temps les Etats concernés à se doter de moyens de défense à l’instar de l’Allemagne qui sera suivie par d’autres. La crise géorgienne illustre aussi la remontée des préoccupations politico-économique gérées par le militaire et non plus pat l’économique.%%% Nous entrons donc dans de nouveaux rapports de force entre Etats, mais aussi dans une nouvelle construction de notre développement économique dans lequel la libéralisation à la Thatcher est d’un autre temps et où le principe de réalité , qu’il soit écologique ou politique va transformer profondément la mondialisation, mais où ce seront les valeurs qui détermineront la voie choisie. Notre responsabilité est historique : responsabilité des intellectuels pour comprendre et concevoir , des économistes pour accepter de remettre en cause leurs dogmes et imaginer,des juristes pour construire des systèmes appropriés à la hiérarchie des valeurs, des politiques pour avoir l’intuition et le courage , de nous tous enfin, pour accepter de changer de monde.