((/images/irlande1.jpg))%%% Les Unes des quotidiens irlandais du samedi 14 juin, lendemain des résultats du référendum en Irlande (photo Vennin/AFP).%%% ((/images/congres-cap21V4.png))%%% Au Congrès national de CAP21 qui a eu lieu samedi et dimanche dernier, François Bayrou, invité à la clôture, a utilisé un proverbe chinois. Il peut s’appliquer pour l’interprétation du non irlandais par certains commentateurs politiques.%%% Ce proverbe dit que quand on montre la lune, les imbéciles regardent le doigt. Ici il ne faut pas voir le non irlandais au premier degré, comme un manque de reconnaissance par un peuple qui a beaucoup profité de l’U. E. En réalité, pour François Bayrou, il faut le comprendre et l’écouter comme transmettant une triple peur, qui se retrouve chez tous les peuples de l’U. E.; d’ailleurs, seul l’Irlande, qui y était obligée par sa constitution, est passée par un dangereux référendum populaire !%%% Voici les trois craintes des peuples:%%% – celle de perte de leur identité,%%% – celle de déficit démocratique devant un texte incompréhensible pour beaucoup,%%% – celle d’un abandon de notre modèle social européen.%%% Voici l’intervention de Corinne Lepage à France 3 qui va dans le même sens:%%%
» Nous pouvons épiloguer sur le non des Irlandais, leur manque de reconnaissance à l’égard d’une Europe qui a transformé leur niveau de vie; il n’en demeure pas moins que le fait que pour la troisième fois, un peuple européen réponde par la négative à la proposition de constitution puis d’accord simplifié pose une question de fond qui ne peut être esquivée. Pourquoi les peuples d’Europe ne se retrouvent pas dans un projet européen qui est pourtant le seul projet fédérateur contemporain, fondé sur des valeurs communes, une histoire partagée et qui s’est révélé positif en terme économique pour lesdits peuples ?%%% Tout d’abord, il est évident qu’un texte aussi complexe, illisible, écrit par des technocrates pour d’autres technocrates ( 272 pages en petits caractères 3000 pages d’annexes) ne peut que très difficilement passer le cap d’un référendum. Tout citoyen veut comprendre ce qu’il vote et force de constater que dans le cas de l’espèce, c’était mission impossible. Mais cette explication n’en n’est pas réellement une. La vraie question est comment avons-nous pu imaginer de construire l’Europe sans ses peuples, a fortiori contre leur volonté ?%%% Car, n’être capable de proposer qu’un texte abscons et sans aucune âme, sans que les européens sachent quelles valeurs et quel avenir leur est proposé est en soi un échec.%%% Cet échec signe aussi celui d’un écart croissant entre les fondamentaux qui ont guidé les pères fondateurs et les réalisations. Notre Europe est devenue à vocation purement économique, fondée sur l’idée que le bonheur des peuples était indexé sur leur taux de croissance. Certes, les programmes universitaires, les réalisations culturelles, et plus récemment l’accent mis sur les développement durable ont constitué des efforts considérables pour instiller d’autres projets que la compétitivité européenne, certes indispensable dans un monde de compétition , mais qui n’ont jamais fait rêver personne. La notion d’identité, la peur d’être broyé dans un système mondialisé dans lequel l’Europe a été présentée comme un outil d’accélération et non comme un instrument de protection , la perte de tout sens au projet européen ont constitué autant de raisons de se méfier de l’Europe .%%% Cet échec signe surtout le fossé croissant entre les peuples et leurs décideurs. Si la quasi-totalité des gouvernements ont décidé de faire voter le traité simplifié par leur Parlement et non par leur peuple, c’est précisément qu’ils avaient peur d’un échec et que le souci de l’efficacité dans le fonctionnement des institutions l’a emporté sur l’aspect politique et prospectif du projet européen. Et c’est justement là que le bât blesse. Les politiques craignent la réaction des peuples européens à la construction européenne ou plutôt à ce qu’elle est devenue. Mais si un certain nombre des lois votées par nos Parlements étaient soumis à referendum , n’en irait-il pas de même ? Très probablement , oui. Dès lors, la question qui est posée est celle savoir comment ce divorce croissant est justifié ? Certes, le courage politique consiste à sa voir précéder son opinion publique et donc supporter dans certains cas, une discordance avec les souhaits de la société. %%% Mais, cette affirmation est subordonnée à deux conditions:%%% – disposer de toutes les garanties pour ne pas se tromper car ce genre de situations ne laisse pas la place à l’erreur,%%% – ne pas faire de ce cas une généralité c’est-à-dire considérer que la politique devient un passage en force systématique.%%% Si tel est le cas, deux situations sont envisageables:%%% – soit la pédagogie et l’explication sont défaillants et le remède est relativement aisé à trouver%%% – soit les décisions ne sont pas explicables , pas justifiables et dans ce cas, la question est celle savoir pourquoi elles sont prise, car elles ont une raison d’être.%%% Dans tous les cas de figure, cette situation n’est pas tenable et le non irlandais en est une illustration.%%% La réponse peut être technique. La poursuite de la ratification du traité simplifié par les Parlements pourrait conduire, dans le meilleur des cas, à une ratification de tous sauf l’Irlande. Dans ce cas, soit une pression serait exercée sur ce pays pour le faire revoter, sans que le succès soit pour autant assuré, soit le blocage serait constaté.%%% Mais, dans tous les cas, la réponse technique n’épuisera pas le sujet. Le mal est beaucoup plus profond; faute d’avoir pu écrire en 3 pages les grandes lignes de ce que devait être le projet européen et les moyens d’y parvenir, les gouvernements ont exclu d’office tout envie d’Europe des peuples qui en étaient les fondateurs. __Recréer l’envie d’Europe impose d’être sûrs d’un partage de valeurs, du respect des identités nationales et d’un projet fédérateur__. Si nous n’y parvenons pas, alors il faudra revenir à une Europe à géométrie variable, avec des projets précis sans aucune capacité de peser sur le destin du monde. C’est tragique au moment même où les crises que nous vivons imposeraient une Europe puissante capable de peser entre la Chine et les Etats-Unis. Mais faute d’avoir compris que sans valeurs partagées et sens, le projet européen était condamné à l’échec, nous avons manqué l’essentiel. Nous ne sommes pas condamnés à rester dans cette situation.%%% Nous avons un destin commun et une responsabilité particulière au regard de l’avenir de la planète, __dans la création d’un modèle éthique de développement durable__. A nous tous de rendre l’Europe désirable, ce qui ne sera pas le moindre defi. «